Peindre par fureur plutôt que se taire
Le langage métaphorique sur la blessure et la souffrance est l’expérience de la cruauté qu’il nous faut connaître comme limite de l’existence.
François Cheval (à propos de Daniel Pommereulle)
ll est des artistes porteurs de suprême lucidité qui savent nous annoncer « les tremblements de terre, les épidémies, les famines, les guerres, le grondement des canons » pour reprendre les termes d’Antonin Artaud dans sa conférence prémonitoire de 1936, à Mexico City, intitulée Anarchisme et société. Il est des artistes dont la voyance est capable d’alerter avec (par exemple) les images et les mots, de l’absurdité dont est capable l’espèce humaine à une époque donnée.
Qu’est-ce qui fait peindre Walter Schmid sinon la rage face à la cruauté du monde ? Ces sévices il les fait siens et les compulse dans des séries aux thèmes évocateurs : la boxe, la prison, l’Iliade. Il les traduit chaque fois avec un lexique pictural précis, le choix de la sobriété du noir et blanc, la décision définitive d’un support pauvre : les bâches reconverties, qui deviennent alors le lieu d’une scénographie où les pinceaux semblent avoir été brandis comme des armes face au drame pour « en relever la dimension nerveuse des démons ». Des images qui blessent peut-être mais qui sont aussi pour accrocher et retenir l’âme.
La technique adoptée dramatise les effets d’ombres et de lumière dans une lutte au corps-à-corps avec les sujets choisis. Prenant sa revanche avec un monde régi par les rapports de force, il répond à cette agressivité latente par une peinture tenant d’une expressivité gestuelle subjective.
Il y a dans la position picturale de Walter Schmid comme un effet de catharsis et de défense face à la puissance latente de la violence ambiante.
Walter Schmid peint dans une sorte d’énergie défensive, sa peinture semble le champ de bataille symbolique d’une confrontation personnelle avec les éléments d’un désastre en attente et de tempête sournoise. L’individu pour subsister doit se créer des armes et la peinture chez cet artiste est acte de résistance.
Joseph Charles Farine






Revue de presse
« L’image du jour: Le ciel est par-dessus le toit de Walter Schmid », Le chat perché, 14.04.2023